Usage
En pratique, la réponse pénale apportée aux faits d’usage est une réponse individualisée et graduée, tenant compte notamment de la nature du produit consommé, de sa quantité et des antécédents judiciaires de l’individu.
Les faits d’usage illicite de produits stupéfiants sont examinés au cas par cas. C’est ce que l’on appelle le principe de l’opportunité des poursuites. Ce principe permet une intervention souple, adaptée à chaque situation individuelle et aux spécificités locales et explique également la diversité des pratiques pénales selon les tribunaux.
La palette des réponses pénales en comporte de 3 natures : l’amende forfaitaire qui est délivrée directement par les forces de sécurité intérieure, les alternatives aux poursuites qui sont décidées par le procureur de la République et les poursuites judiciaires qui débouchent sur une décision d’un juge.
L’amende forfaitaire délictuelle
Depuis 2019, en vertu de l’article L.3421-1 du code de la santé publique, l’usage illicite de stupéfiants peut donner lieu à une amende forfaitaire (articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale).
Une personne interpelée en train de faire usage d’un stupéfiant ou en possession de petites quantités, peut recevoir une amende forfaitaire de 200 euros délivrée immédiatement par les policiers ou gendarmes.
Le montant de l’amende est réduit à 150 euros si elle est payée immédiatement ou dans les 15 jours et, au contraire, augmenté à 450 euros si elle est payée au-delà de 45 jours.
Le paiement de l’amende met fin à toute poursuite judiciaire. Il vaut reconnaissance de culpabilité. L’infraction est inscrite au casier judiciaire.
L’usager a la possibilité de contester l’amende. En cas de contestation ou à défaut de paiement de l’amende, l’affaire fait l’objet d’un traitement judiciaire qui peut déboucher sur un procès devant le tribunal correctionnel.
La procédure d’amende forfaitaire n’est applicable qu’aux personnes majeures et en cas d’usage simple (pas d’autres infractions constatées).
Cette procédure permet un traitement rapide et efficace des procédures les plus simples. Elle s’inscrit dans une politique pénale qui préserve la proportionnalité de la réponse pénale et l’engagement de l’autorité judiciaire dans la politique de prévention des conduites addictives. Il revient aux procureurs de la République de définir, par des instructions aux forces de sécurité intérieure, les modalités de recours à cette procédure. L’amende forfaitaire a principalement vocation à se substituer aux situations qui, jusqu’alors, donnaient lieu au classement sans suite de la procédure après rappel à la loi ainsi qu’à celles qui, quoique révélant la commission d’une infraction, n’étaient pas toujours prises en compte d’un point de vue judiciaire. Elle n’a, en revanche, pas vocation à se substituer aux réponses sanitaires et sociales que les parquets mettent en place dès lors qu’est mise en évidence une problématique d’addiction, de désocialisation ou de troubles psychiatriques.
Les mesures alternatives aux poursuites
Pour toute infraction, dont l’usage de stupéfiants, la loi prévoit des mesures alternatives aux poursuites : le procureur de la République, au lieu de saisir le Tribunal, propose à la personne d’exécuter une ou plusieurs mesures. Si la personne accepte et exécute les mesures, le procureur de la République classe l’affaire sans suite. En revanche, leur non-respect, même partiel, peut entraîner une convocation devant la juridiction en vue d’un jugement.
Les mesures alternatives peuvent-être inscrites ou non au casier judiciaire.
Les mesures non inscrites au casier judiciaire sont prévues à l’article 41-1 du code de procédure pénale. Elles sont, en matière d’usage de stupéfiants, principalement les suivantes :
- le rappel à la loi par un officier de police judiciaire ou le délégué du procureur ;
- l’orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle : dans ce cadre la personne est invitée à prendre contact avec une structure de soin ; il peut également lui être demandé d'accomplir un stage ou une formation dans un organisme sanitaire, social, ou professionnel, notamment un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants à ses frais ;
- l’injonction thérapeutique.
Les mesures inscrites au casier judiciaire sont des mesures de composition pénale décrites à l’article 41-2 du Code de procédure pénale. Une mesure de composition pénale, proposée par le procureur de la République, doit être acceptée par la personne et validée par un juge. Les mesures susceptibles d’être ordonnées en matière d’usage de stupéfiants sont les suivantes :
- le paiement volontaire d’une amende de composition ;
- le travail non rémunéré au profit d’une collectivité d’un maximum de 60 heures ;
- l’injonction thérapeutique ;
- la réalisation d’un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de stupéfiants aux frais de l’usager.
Lorsque les mesures ordonnées ne sont pas respectées, le procureur de la République poursuit la personne devant la juridiction de jugement.
Les poursuites et le passage devant la juridiction de jugement
Si la gravité des faits ou le passé de la personne mise en cause le justifient et rendent toute alternative inappropriée pour sanctionner l’usage de stupéfiants, le procureur de la République peut décider d'engager des poursuites (il met en œuvre l'action publique).
Ces poursuites peuvent prendre plusieurs formes procédurales qui donnent lieu à une condamnation en cas de déclaration de culpabilité. Les voies procédurales le plus souvent utilisées pour les infraction d’usage de stupéfiants sont les suivantes :
- l’ordonnance pénale, procédure simplifiée permettant, pour certains délits seulement, le jugement sans comparution de la personne devant la juridiction de jugement. La personne ne peut être condamnée qu’à une peine d’amende et/ou une peine complémentaire. Aucune peine d’emprisonnement ne peut être prononcée dans ce cadre ;
- la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) : elle permet au procureur de proposer une ou plusieurs peines à une personne qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés. La CRPC suppose la tenue d’une audience publique au cours de laquelle la peine proposée par le procureur et acceptée par la personne, doit être homologuée par le président du tribunal ;
- le jugement devant le tribunal correctionnel.
Lorsque les poursuites ont été engagées, le juge ou le Tribunal peut prononcer une peine d’emprisonnement d’une durée maximale d’un an et/ou une peine d’amende d’un montant maximum de 3 750 euros.
Cette peine peut être portée à 5 ans d’emprisonnement et/ou 75 000 euros d’amende lorsqu’elle a été commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, ou par le personnel (y compris intérimaire) d'une entreprise de transport terrestre, maritime ou aérien, de marchandises ou de voyageurs exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité du transport.
Ces peines peuvent être assorties d’un sursis, et pour l’emprisonnement, d’un sursis probatoire avec un certain nombre d’obligations (par exemple, une obligation de soins ou une injonction thérapeutique).
Le juge ou le Tribunal peuvent prononcer d’autres peines :
- des peines alternatives à l’emprisonnement : prévues pour l’ensemble des infractions, ces peines ne peuvent être prononcées qu’à la place de la peine d’emprisonnement. Il s’agit notamment :
- de la peine de travail d'intérêt général selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code ;
- de la peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;
- des peines prévues à l’article 131-6 du Code pénal comme :
- la suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, l'interdiction de conduire certains véhicules pendant une durée de cinq ans au plus, l’annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
- la confiscation d'un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné ou l'immobilisation, pour une durée d'un an au plus, d'un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
- le retrait du permis de chasser avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
- l'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de paraître dans certains lieux ou catégories de lieux déterminés par la juridiction et dans lesquels l'infraction a été commise ;
- l'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de fréquenter certains condamnés spécialement désignés par la juridiction, notamment les auteurs ou complices de l'infraction ;
- l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale.
- des peines complémentaires, qui peuvent être prononcées en plus de l’amende ou de l’emprisonnement ou en remplacement de ces peines. Ainsi en est-il de :
- la peine d’injonction thérapeutique qui est une mesure de soins pénalement ordonné dont le suivi est assuré par un médecin relais, prévue aux articles L3413-1 à L3413-4 et L3423-1 et suivants du code de la santé publique ;
- la peine d'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage, par exemple un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants ou de sensibilisation à la sécurité routière prévue par l’article 131-5-1 du Code pénal.